De parler des Educs ...

Publié le par Cam

Un éduc ? Qu'est ce que c’est un éduc ? Haaa, oui, c’est ceux qui travaillent avec les handicapés.

 

A ce stade de la conversation, je n’ai qu'une envie, c’est de mettre une claque à mon interlocuteur. Aujourd’hui, fidèle lecteur, pour mon grand retour sur Zoom, j’ai décidé de remettre les pendules à l’heure et de parler de ce métier méconnu aux yeux de tout le monde, de ce travailleur social que tout le monde ignore, j’ai nommé l’Educateur Spécialisé.

 

C’est un étrange spécimen. Rassurez-vous, il a deux bras, deux jambes, deux yeux, une bouche, un nez deux oreilles, bref, il est normalement constitué. La première chose à retenir sur l’Educateur, c’est qu'il travaille par vocation, et non par désir de ramasser 5000 euros par mois pour se payer un week-end à Saint Barth toutes les deux semaines. Il gagne honnêtement sa vie, mais son salaire est le cadet de ses soucis, car voyez vous, l’Educateur accompagne dans leur quotidien des personnes en difficultés.

Et j’entends par personne en difficultés, les handicapés physiques en mentaux, certes, mais aussi les enfants placés par l’Aide Sociale à l’Enfance, ou ASE (anciennement Assistance Publique),  les SDF, les femmes battues, les jeunes délinquants, les toxicomanes, les familles en extrême précarité qui sont accueillies en CHRS (centre d’hébergement et de réinsertion sociale), les résidents d’hôpitaux de jour …

Concrètement, l’Educateur Spécialisé travaille au moyen d’ateliers, pour laisser les résidents s’exprimer, et suivant les structures et le public en charge, il peut aider dans les gestes de la vie quotidienne, apprendre à gérer une vis sociale et communautaire. Il est aussi là pour écouter, parler, échanger avec les résidents, sans sortir de son rôle éducatif.

 

L’Educateur Spécialisé passe un diplôme pour pouvoir exercer son métier. Enfin, ça c’est dans les lois, parce qu'en fait, il est tout à fait possible de travailler sans diplôme et avec un petit piston, voire même pas de pistons du tout parce que ces domaines sont en grande demande de personnel et que parfois, la motivation et le sérieux prime sur les diplômes.
Quoi qu'il en soit, le diplôme, ça fait toujours mieux sur un CV. Quelques petites précisions dessus : il s’obtient après trois ans d’études, dans des écoles spécialisées. Pour rentrer dans ces écoles, il faut passer un concours, (un écrit d’admissibilité, puis un oral d’admission) (et même que des fois je me demande comment ils ont fait certains de mes camarades pour avoir le concours tellement c’est des crétins), concours payant, entre 150 et 200 euros le concours, sans compter qu'il vaut mieux tenter plusieurs écoles, puisque les critères d’admission varient énormément d’une institution à l’autre. Donc en fait, pour faire éduc’, il faut être riche. Durant ces trois ans d’études, il est nécessaire, que dis-je obligatoire de faire un total de 15 mois de stage. De préférence dans des milieux très variés, parce que sinon, après pour trouver du boulot, c’est un peu compliqué. Et enfin, la formation propose beaucoup de théories, des techniques de médiation éducatives, et la découverte du monde social dans son ensemble. Et bien sûr le fameux mémoire, avec un sujet libre, qui a bien sûr attrait au social. Par exemple, si vous faites votre mémoire sur la reproduction des mouches tsé-tsé en Amérique du Sud, je ne suis pas sûre que vous obtiendrez votre diplôme.

 

Une fois le papier en poche (pour moi, ça sera dans deux ans si tout va bien), il vous reste toute votre vie pour voir que votre profession n’est absolument pas reconnue, que vous êtes pas supers bien payés par rapport à ce que vous fournissez comme travail (attention, le minimum vital est acquis, mais bien souvent, on se dit qu'on mériterait trois fois plus), que quand un éducateur se met en grève, tout le monde s’en fiche, que la convention 66, elle vous sucre tous vous droits et vous fait perdre de l’argent, que vous faites un métier difficile et qu'il est parfois dur de voir tant de misère humaine,  que vous êtes souvent confronté à des situations révoltantes, et que vous ne pouvez rien y faire, que vous avez des collègues complètement stupides qui ont des pratiques professionnelles lamentables, mais que là non plus vous ne pouvez rien y faire, que vous êtes toujours bloqués par des restrictions budgétaires draconiennes, que les technocrates préfèrent faire des coupes franches dans les budgets du travail social, soit disant parce que ce n’est pas important, que même si vous voulez vous mettre en grève, votre conscience professionnelle vous en empêche … Vous vous sentez indispensables, et vous l’êtes certainement, mais tout le monde s’en fiche.

 

Je lance un appel, à tous ceux qui passeront par ici. Parlez un maximum autour de vous de ce métier. Dites bien que les Educateurs Spécialisés, ainsi que les Moniteurs Educateur, les Educateurs Jeunes Enfants, les Aide Medico-Psychologique, tous ces gens galèrent pour faire valoir leurs droits alors qu'ils exercent dans une branche du social particulièrement difficile. Faites avoir à tout le monde que nous travaillons pour aider des personnes en grande détresse, que ce soit physique, psychologique ou les deux. Que nous nous battons tous les jours pour ceux que nous avons en charge, et que rien n’est plus beau que de voir un enfant meurtri avancer sur le chemin de la guérison, un handicapé devenir autonome, un toxico se soigner et assumer son passé, un SDF reprendre sa vie en main, une famille en détresse retrouver un équilibre social et professionnel. Et c’est encore plus beau de savoir que c’est un peu grâce à nous qu'ils ont réussi à avancer.

 

N’oubliez pas les Educateurs. Sans nous, la France irait beaucoup plus mal.  

Publié dans De l'utilité...

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M
En tout cas personne ne pourra dire que tu n'es pas passionné par ce que tu fais ^^
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C
Dangereux ... Ca dépent dans quelle branche tu bosses. Franchement, en étant avec des enfants handicapés mentaux actuellement, je ne me sens pas en danger physique. C'est plutôt eux qui se mettent en danger de part certains de leur comportement (vol, fugue, violentes disputes). Quoi que y'a deux jours, j'ai complètement pété une durite avec une gamine ... elle s'éclate à pousser les adultes à bout, elle a réussi. Heureusement je ne suis pas violente, parce que régulièrement elle en arrive aux mains avec les éducs. Mais par contre, je ne pensais pas capable de hurler comme ça.En fait, un éduc se met plutôt en danger mentalement, parce qu'il fait face à beaucoup de fragilité, et du coup, parfois, l'affect' peut prendre le dessus sur l'empathie et on a plus le recul et les ressources nécessaires pour aider le résident à faire face. L'educ' est en danger quand il ne sait pas poser la bonne distance. Après, si tu bosses en éduc de rue auprès de SDF, ou encore dans un foyer pour adolescents violents, oui, tu peux aussi être en danger physiquement. Mais après, c'est à toi de faire en sorte de trouver les bons comportements et les bonnes réactions pour ne pas être en danger. Et surtout, ne jamais montrer que tu te sens en danger, parce que sinon tu es foutu ! La journée type, je vais essayer d'en faire une, d'autant plus que j'ai une structure d'accueil avec des plannings ... spéciaux on va dire, et donc du coup, j'ai deux sorte de public en charge qui sont très différents !
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F
Tu veux pas me pistonner?bon, sérieux... le métier d'éduc b'en c'est le métier d'éduc. Quand j'en ai parlé à ma mère l'uatre fois, se première réaction a été de me dire "mais c'est dangereux!"Oui, certes c'est dangereux. Et alors?Ton article est super intéressant et réaliste. Comment ne pourrait-il pas l'être?Mais tu sais quoi Camcamcamcamois d'or, tu devrais nous faire vivre une journée-type... risques compris.;)
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